Philippe Meirieu écrit à Xavier Darcos: «Nous avons besoin de véritables États généraux de l’Éducation»

Dans cette lettre ouverte au Ministre Darcos, Philippe Meirieu exprime son inquiétude devant une «Éducation nationale gravement ébranlée».

«Or, aujourd’hui, vous ne pouvez pas ignorer qu’une très grande partie des enseignants considère que vous êtes le maître d’œuvre de ce démantèlement, dont le maître d’ouvrage est à l’Élysée. Il ne suffira pas de vous récrier pour les apaiser. Il faut vraiment et radicalement changer de politique… Pas pour cultiver l’immobilisme, mais parce que les défis éducatifs d’aujourd’hui requièrent une mobilisation collective sans précédent.»

Au Québec, la balle est également dans la cour des enseignants… pour ne pas dire le cours!

Pendant que les éditorialistes se demandent «À qui la faute» de la dégradation en français des élèves du primaire mesurée dans une épreuve d’écriture, le professeur masqué pointe du doigt les méchants «pédagogues du renouveau». Au RAEQ, on publie un texte qui identifie d’autres causes possibles…

Selon moi, la réforme (ou le renouveau), personne ne sait ce que c’est devenu, pas même au MELS. On n’en parle plus. Je me demande même si elle a déjà existé. Il y a bien eu des changements de proposés, de gros changements, mais ce que nous vivons et surtout, comment on l’a vécu, ça ressemble peut-être à ce que décrit M. Meirieu dans ce passage de sa lettre:

«Au fond, Monsieur le Ministre, votre politique décourage les enseignants parce qu’elle met à mal leur identité de professeurs».

C’est ce qui m’importe au moment où cette année 2009 arrive: entendre les enseignants!

André Chartrand écrit sur son blogue qu’il «règne actuellement une doxa pédagogique à laquelle beaucoup d’enseignants croient devoir se conformer, même s’ils sont conscients que les contours restent flous». Au-delà de la baisse de certains résultats, c’est ce qui m’inquiète.

«Réduire l’acte pédagogique à une transmission frontale de plus en plus formelle» n’est pas la solution, mais rien ne se fera jamais sans les enseignants en matière de réforme à l’école et en classe. Autant en France qu’ici au Québec et ailleurs, la capacité de mobiliser les enseignants reste au coeur d’une équation à résoudre pour augmenter la réussite scolaire.

La lettre de Meirieu vise juste, même si nous avons déjà essayé cette formule des États généraux sans parvenir à cette mobilisation. Il faut dire que c’est ce qui a suivi qui semble avoir posé problème. Et encore, je sais que plusieurs enseignants ne sont pas prêts à dire que c’était mieux avant ces États généraux; les derniers quinze ans nous ont quand même beaucoup fait cheminer sur le plan professionnel. Si l’inquiétude demeure, elle n’atteint pas le volume de ce qui se passe dans les rues en France. Je lui laisse la conclusion:

«Il y a des élèves qu’aucune injonction ni menace de sanction ne peuvent mettre au travail, des élèves qui, malgré toutes nos bonnes intentions, «ne veulent pas». Cette «résistance» à notre projet peut engendrer résignation, rejet ou exclusion; mais elle peut aussi, en articulant le principe d’éducabilité et la confiance dans la possibilité d’un sujet à engager sa liberté d’apprendre, stimuler notre inventivité pédagogique pour offrir à nos élèves les situations les plus variées et mobilisatrices possibles.»

Mise à jour du 2 janvier: Louis Cornellier tient des propos très intéressants à propos de ce qu’on met «sur le dos du renouveau pédagogique» dans cet article au Devoir. À lire!

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1 Commentaire
  1. Photo du profil de LucPapineau
    LucPapineau 14 années Il y a

    Si vous me le permettez, M. Asselin, pendant des années, des enseignants ont crié qu’ils ne croyaient pas à ce Renouveau. Ils en questionnaient les bases, les fondements, l’application. Certains se sont même regroupés sous la bannière Stoppons la réforme.
    À l’époque, on n’a absolument pas tenu compte de leur avis. On a fait la réforme envers et contre eux. Après de longues années est arrivée la ministre Courchesne avec certaines mesures pour «corriger» les choses. Mais peut-on vraiment corriger le fatras actuel?
    Dans les faits, le milieu de l’éducation est actuellement un vrai foutoir.
    La ministre y va avec ses idées. On sent dans les CS, au MELS et chez certaines directions d’école beaucoup de cynisme à l’égard de ces dernières. On applique parfois ce qui est demandé, mais sans zéle.
    Chez les profs, il y a ceux qui n’ont jamais cru à la réforme et qui se sont sentis bulldozés pendant des années. Ils ont soit résisté à celle-ci ou l’ont appliquée mollement. Il y a aussi ceux qui déchantent en voyant les actions de la ministre qui remet en question ce en quoi ils croyaient.
    Et puis, il y a tous ces profs qui sont mal formés pour appliquer une réforme pas toujours claire, encore plus avec les nouveaux changements.
    À cet égard, en constatant les résultats actuels de nos élèves de la réforme, on peut sérieusement se questionner sur l’efficacité de celle-ci et attendre de ceux qui l’ont proposée qu’ils assument leurs actions au lieu de blâmer les autres.

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