Le dialogue morbide

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec dans la section « blogue ».

Après les journalistes James Foley et Steven Stoloff, un travailleur humanitaire enlevé en mars 2013, David Haines, a été sauvagement assassiné par les jihadistes de l’État islamique (EI). L’annonce de la mort du Britannique (les deux premiers étaient américains) nous replonge dans le même cauchemar, fois après fois, par vidéo interposée : blouse orange portée par la victime, homme masqué armé d’un couteau, message adressé au chef d’État du pays d’origine du condamné à mort et exécution filmée de l’otage.

Toute la mise en scène est diffusée sur Internet par une vidéo qui se termine sur une séquence où on montre un autre otage menacé du même sort que les autres par son bourreau. Cette fois, il serait question de Alan Henning, qui «effectuait des missions humanitaires pour une organisation non gouvernementale musulmane» avant d’être kidnappé «durant la période de Noël dans le village d’Al-Dana, dans le nord de la Syrie» (source).

L’horreur qui tourne en boucle.

J’ai déjà évoqué le fait que ces personnes qui meurent ainsi, froidement décapitées, sont des martyrs.

En ce moment, le pire me semble être l’espèce de dialogue que veut entretenir celui qui applique le couteau à la gorge de ses victimes. Menaçant dans les deux premières vidéos le président Obama et dans la troisième, le premier ministre britannique David Cameron, l’homme provoque l’escalade de la tension par des répétitives bravades qui forcent des réactions, au grand dam de tous. On voudrait bien ne pas réagir, j’imagine, mais le rythme soutenu des horribles meurtres devant public ne laisse pas beaucoup de choix.

Sans penser aux parents de ceux qui décèdent dans ces intenables circonstances…

C’est ici que l’abomination (existe-t-il un mot plus juste?) menotte ces pères et ces mères et toutes les familles : sachant que ceux qui sont ainsi menacés (Obama, Cameron et avec eux toute notre civilisation) ne peuvent en rien céder, que peuvent-ils espérer?

Jusqu’à quel point poursuivre dans tous les déserts les responsables de ces meurtres abjects pourra panser les plaies ouvertes?

Entre le 2 septembre (moment où l’assassinat du journaliste Steven Stoloff a été revendiqué) et hier, il ne s’est pas écoulé beaucoup de temps et on ne sait pas combien d’otages les jihadistes tiennent en captivité.

Le mot «terroriste» est trop faible pour qualifier l’anticipation de la douleur que ce dialogue morbide sème avec lui.

Je me considère humaniste, mais devant ces exécutions aussi répétitives que avilissantes, je ne trouve aucune trace de liberté dans le comportement de cette sorte d’humain qui tente d’installer la terreur et d’écraser par une mécanique programmée, nos valeurs.

Je sais bien qu’il ne faut pas céder à la peur.

Nous devons nous inspirer des familles de ceux qui sont à genoux devant leur bourreau. Trouver en nous le courage qui est en eux.

On a beau ne pas vouloir céder au terrorisme, reste que cette guerre qui prend de plus en plus racine contre l’État islamique (EI) n’annonce rien de bon.

Quelqu’un sait comment le germe de cette colère transformée en barbarie a été semé dans ce désert où on enlève de façon si indigne la vie d’innocents?

En attendant, toute ma compassion se tourne vers la famille de Alan Henning. L’espoir a grand besoin d’être réanimé.

Ajout : La décapitation, histoire d’une épouvante, sur ce sujet du nouveau terrorisme par l’image.

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