Prière de ne pas prier

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section « blogue ».

La Cour suprême du Canada a dit non aujourd’hui à la prière au conseil municipal de Saguenay. J’ai toujours trouvé que ça manquait d’humilité la prière en public, à moins d’être dans un lieu de culte…

Je ne suis pas particulièrement religieux, même si j’ai travaillé pendant vingt-deux ans avec des communautés religieuses. Par contre, j’ai toujours eu le plus grand respect pour la religion ou pour ceux qui n’y croient pas du tout. Il faut dire que les fidèles sont capables du meilleur et du pire. Comme tout le monde…

Ayant découvert les valeurs religieuses avec les Missionnaires Mariannhill, les Sœurs de la Présentation de Marie, les Sœurs de Saint-Joseph de Saint-Vallier et les religieuses de Charité de Saint-Louis (tous des employeurs), je n’ai jamais été impressionné par les sparages des exaltées qui veulent absolument qu’on sache qu’ils sont pieux ou encore les agressifs qui sont indisposés dès qu’il est question de religion.

Je suis baptisé, j’ai fait baptiser mes enfants, mais pour le reste, vous n’en saurez pas plus.

J’ai toujours considéré que les convictions religieuses, c’était comme la culture: moins on les met en pratique, plus on en parle…

Bon… c’est pas tout à fait ça la maxime.

On comprendra donc que le jugement d’aujourd’hui qui met fin à neuf ans de conflits sur la pratique du maire de Saguenay qui consiste à réciter la prière catholique en l’accompagnant du signe de croix au début des assemblées du conseil municipal me convient parfaitement.

Je n’ai jamais compris pourquoi la prière de quelqu’un qui se recueille en silence pouvait être moins ardente qu’une autre qui se la pète.

J’ai rencontré tellement de religieux qui priaient sans que je m’en rende compte et qui m’impressionnaient par leur humanisme et leur intégrité qu’avec le temps, j’ai même appris à me méfier de ceux qui voulaient que ça se sache absolument.

Même à la messe (quand j’y allais), je m’éloignais systématiquement de ceux qui en faisaient trop pour montrer l’ardeur de leur pratique religieuse. Comme je travaillais avec eux, je voyais bien le paradoxe de leur témoignage sur le plan des valeurs chrétiennes en dehors de la chapelle…

Je n’ai aucune idée de ce que pourrait en penser un «officiel» de l’Église (Évêque, simple curé ou Supérieur de communauté), mais il m’a toujours semblé que les plus grands défenseurs de la foi n’étaient pas ceux qui la criaient le plus fort.

Mais ceux dont les actions auprès de «leur prochain» parlaient fort, plutôt…

Cela dit, je ne jette pas la pierre à ceux qui croient que le jugement d’aujourd’hui est une calamité. Je les plains.

D’autant comme l’écrit Alain Crevier (un homme que je respecte énormément en cette matière) que «la Cour suprême est limpide. Ce n’est pas acceptable. Jugement unanime.»

«Autrement dit, ce n’est pas acceptable de dire aux citoyens qui ne partagent pas votre foi d’aller dehors en attendant que finisse le temps de prière du conseil municipal. Inacceptable.»

C’est le bon sens qui triomphe, neuf années plus tard.

Si on croit très fort à la puissance de la prière, il me semble qu’elle ne s’adresse pas aux mortels qui nous entourent, mais à Dieu qui lui, devrait d’abord être en nous.

J’imagine que la doctrine officielle de chaque religion doit avoir quelque chose à dire sur le fait des prières flamboyantes et collectives dans les lieux publiques. Mais ça ne m’a jamais intéressé…

Personnellement, j’ai appris au contact des religieux/ses que j’ai fréquentés(es) que la prière ne sert pas à convaincre les autres de la grandeur de sa foi. On m’a plutôt montré qu’elle est d’abord une démarche gratuite, et ensuite, un moment privilégié de dialogue avec Dieu.

Je vais paraître bien vieux jeu de commenter ainsi le jugement de ce 15 avril 2015, mais je le dois à ces personnes de grandes valeurs que j’ai côtoyées dans les écoles que je dirigeais. J’ai beaucoup pensé à eux et à elles, aujourd’hui.

J’ai toujours senti dans les communautés religieuses missionnaires un profond respect pour la prière.

En même temps, j’ai constaté en les regardant aller que ces hommes et ces femmes croyaient transmettre l’essentiel de leur foi dans l’action quotidienne.

J’aime à penser ce soir que les juges de la Cour suprême du Canada ont un petit côté missionnaire. Ils ont fait oeuvre utile, c’est certain !

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