Mon ami Clément…

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section du blogue des «spin doctors».

J’ai un bon copain qui est président du Parti québécois pour la région de la Capitale-Nationale. C’est un homme de grande valeur reconnu pour son intégrité, sa compétence et son engagement. C’est le genre d’individu avec qui tout le monde voudrait être associé. Depuis le départ de Pierre Karl Péladeau (qu’il a appuyé), il écrit sur son blogue à chaque jour, signe qu’il compte s’impliquer à fond dans la suite des évènements au PQ. Je prends le temps aujourd’hui de lui écrire pourquoi il a tort de penser « qu’un véritable débat au sein du Parti Québécois » inquiète le parti pour lequel je milite et mon chef.

* * * * * *

Clément,

Nous avons été associés à l’époque dans une même entreprise et tu sais jusqu’à quel point j’ai de l’estime pour toi. « Ton parti » semble se destiner à vivre une course entre deux amis (parmi les candidats, il semble bien que Véronique Hivon et Alexandre Cloutier seront « concurrents »). Suite à la publication de ton billet d’hier je me permets de répondre publiquement, en ami, à tes propos.

Je me dis que si deux amis du même parti décident de « s’affronter » dans une course à la chefferie, deux amis nationalistes peuvent bien s’escrimer un peu sur la place publique dans ce même esprit de recherche du bien commun.

Tu attribues à mon chef dans ton billet des motifs qui me font tiquer: tu laisses entendre qu’il ne serait pas souhaitable « qu’il y ait un véritable débat au sein du Parti Québécois au cours des prochains mois ».

Tu écris qu’il se lance « dans une campagne de dénigrement ultra-intéressée », et tu ajoutes qu’il y aurait « des gens qui craignent que le Parti Québécois redevienne une véritable force politique ». J’imagine que tu visais spécifiquement Sol Zanetti (chef de Option nationale) et François Legault que tu apostrophes tous les deux au début de ton texte.

M’enfin… je ne parlerai pas pour eux, ce serait maladroit.

Mais je souhaite te dire ce que je pense de tes arguments parce que je crois que c’est au coeur des cinq prochains mois où vous vous chercherez un autre chef pour diriger votre prochaine campagne électorale.

D’abord, je suis de ceux qui croient que le Parti québécois représente encore une force politique. Son tirant d’eau est moins fort qu’il a déjà été, mais il demeure important. Je ne m’obstinerais pas avec toi et avec d’autres péquistes si je vous croyais devenus insignifiants.

Si le militant de la CAQ en moi pourrait avoir intérêt à ce que « votre force politique » continue son déclin tranquille de manière à être davantage en mesure de travailler plus étroitement avec vous, entre nationalistes, ce n’est pas dans mon intérêt de vous regarder de haut.

Bref, c’est un peu ridicule de croire que le brassage d’idées au PQ m’inquiète ou inquiète qui que ce soit.

Ce qui m’irrite cependant (car certaines de vos idées me tarabustent), c’est votre insistance à vouloir jouer le jeu de Philippe Couillard pour qu’encore une fois, le scrutin de 2018 porte sur la question nationale.

En ce sens, le choix entre le mirage ou l’ambition s’explique facilement.

Si vous changez de chef pour remettre de nouveau les clés du PQ à quelqu’un qui n’est pas clair sur l’article UN, vous donnez encore beaucoup de prise à ce que la prochaine élection porte sur un référendum (ou pas) sur la souveraineté. Ce devenait évident avec PKP comme chef, ce le sera aussi avec n’importe quel candidat élu qui souffle le chaud et le froid sur ce sujet dans le même discours.

J’écoutais ce matin Véronique Hivon au micro de Paul Arcand. Je ne sais pas combien de fois M. Arcand a dit dans l’entrevue « Mme Hivon, je ne sais toujours pas ce que vous pensez », après lui avoir posé une question simple. Et il en a posé plusieurs…

Je veux bien qu’il y ait des débats de fond au PQ, mais si c’est comme d’habitude, on va continuer de tourner autour du même sujet sans être clair.

Le PLQ aura alors le loisir de vous définir pour un référendum.

Clément, tu ne peux pas reprocher à François Legault de tenter de vous définir lui aussi comme « des obsédés » du référendum sur la souveraineté.

Tu sais que les électeurs n’en veulent pas et la première candidate déclarée à la chefferie n’a rien fait pour s’en distancer dans l’annonce de sa candidature.

Il y a d’ailleurs fort à parier que tous les candidats vont continuer de louvoyer sur ce sujet parce qu’ils auront peur de déplaire à la base des purs et durs de votre parti.

Peut-être que ceux et celles qui n’ont aucune chance de gagner vont être plus clair, et ce sera pour le promettre, dans un premier mandat.

As-tu observé que « Mme convergence » se sert de ses conversations avec Option nationale et Québec solidaire pour justifier son absence de position.

La course risque d’être longue…

Tu écris « La campagne n’est même pas commencée que l’artillerie se déchaine ».

La campagne est bel et bien commencée Clément.

Je ne sais pas si « l’artillerie » Zanetti / Legault est « déchainée », mais tu devrais comprendre que c’est l’ambiguité de votre position sur la question nationale qui nous rend tous nerveux.

On a l’impression de toujours jouer dans le même vieux film.

On a de l’ambition pour le Québec et le Parti québécois nous enferme dans ce mirage de l’attente du Grand Soir qui n’arrivera pas en 2018.

Bref, ce que tu nommes de « l’aveuglement partisan » est une critique légitime de votre incapacité à prendre position sur cette foutue question du référendum.

Tu crois que ça va s’améliorer avec l’autre chevalier shakespearien ?

Il risque lui aussi de jouer la même carte de la promesse d’un pays-un-jour-ou-l’autre.

Si Sol Zanetti ou François Legault te donnent l’impression de répéter « C’est moi le meilleur », c’est peut-être parce qu’ils croient sincèrement que leur projet de société est plus clair, moins floue et surtout, nouveau et différent de ce que le PQ s’obstine à nous présenter à chaque fois: « On veut un pays », mais on sait pas trop comment / pourquoi vous le dire.

Il y aurait tellement à échanger si on centrait notre attention sur nos ambitions mutuelles pour le Québec.

Mais vous nous entrainez à chaque fois sur le mirage du pays imaginaire.

Pour « débattre et (re)prendre des forces », il faudrait qu’il y ait de véritables propositions sur la table. Écoute l’entrevue de Paul Arcand avec Véronique Hivon et trouve-moi une proposition à débattre, Clément.

Je te lis re.li.gi.eu.se.ment.

Je sais que tu es animé des meilleures intentions.

Laisse faire François Legault et Sol Zanetti.

Tu auras beaucoup mieux à faire à tenter de secouer les Cloutier, Hivon, Ouellet, Marceau, Lisée et les autres pour qu’ils se branchent sur quelque chose de tangible et de surprenant.

En toute amitié…

Mise à jour de l’après-midi: Clément Laberge a répondu à ce billet dans lequel je l’interpellais par « Une affaire de confiance (et de retrousse de manches) ». Il n’y aurait rien d’embêtant selon lui à ce qu’il n’y ait pas de référendum avant 2022. Il y a matière dans son texte à poursuivre le dialogue. On reprendra ça alors…

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